De l’autre côté du miroir : le témoignage de Renate

Je suis Renate, et voici mon témoignage :

70 ans, célibataire, et à la retraite, je n’avais jamais été aussi occupée de ma vie : cours de théâtre, cours de peinture, sport, lecture, quelques actions associatives, sorties avec mes amis. J’ai aussi deux enfants, certes majeurs et indépendants, mais une Maman reste toujours une Maman. J’ai régulièrement accompagné des patients. J’aide d’ailleurs actuellement une de mes amies qui souffre d’une pathologie lourde.
Bref, il y a peu, je ne voyais pas le temps passer !

Mais patatras ! Il y a quelques mois, le ciel m’est tombé sur la tête : diagnostic tardif d’un vilain cancer à un stade très avancé. Pas de chirurgie possible. Mise en place immédiate d’un protocole de chimio lourd. En un instant, je suis passée de l’autre coté du miroir.

Bien entendu mes enfants et mes amis se sont mobilisés pour m’accompagner.
Ils m’ont permis de tenir le coup et de me projeter dans le combat contre la maladie. Les premières semaines ont été un tourbillon : analyses de sang, scanners, IRM, PET-Scan, rendez-vous multiples avec des médecins inconnus, dans des cliniques et hôpitaux différents.
Les fins de journée, j’avais pris l’habitude d’échanger avec enfants et amis, les tenant ainsi des dernières évolutions. Les conversations étaient aussi longues que régulières.

Mais voilà ! Maintenant que le protocole de soins est stabilisé, que j’ai accepté ma perruque toute neuve , et que j’ai pris mes marques, j’ai besoin de respirer.
J’ai besoin de faire autre chose que de m’occuper exclusivement de ma santé. J’ai besoin de me remettre à peindre et à lire. Bien sûr, les cours de théâtre seront remis à plus tard, cependant quelques sorties avec mes amis les plus proches seraient les bienvenues.
Mais pour cela, il me faudrait en avoir le temps ! Et ce temps est trop largement occupé à répondre aux appels, ou à accepter les visites, au demeurant sympathiques et prévenantes, de toutes ces personnes qui m’ont aidée, et qui souhaiteraient encore le faire tant elles sont persuadées qu’il ne faut pas que je reste seule.

Comment leur dire ? Comment ne pas passer pour une ingrate ? Comment ne pas culpabiliser ?

Lectrice fidèle du blog “Mission Guérison”, j’adhère complètement à la 7è notion : « ne pas s’isoler ». Croire que l’on n’a besoin de personne est une erreur, et un fort mauvais choix.
J’ai alors cherché si, dans cette notion, il existait quelque chose qui correspondait à mon cas.
J’ai bien trouvé comment fuir les relations toxiques, mais rien sur comment freiner les ardeurs d’un surplus de personnes bienveillantes et sincères !!!

J’ai donc pris quelques dispositions de simple bon sens. Je vous les livre dans ce témoignage, et j’espère de tout coeur qu’il pourra être utile à certains d’entre vous :

J’ai parlé à mes proches. Simplement, et sans tourner autour du pot. Je leur ai fait part de mon ressenti, de mon besoin, et de mes envies. Je les ai rassurés en leur disant que je les tiendrai au courant des évolutions importantes à venir. Et je leur ai dit que je préférai aussi le faire par mail et de manière collective, pour me permettre d’éviter les répétitions inutiles et psychologiquement difficiles à supporter.
Et puis, j’ai appris à dire « non » aux sollicitations qui me privaient du temps dont j’avais besoin pour m’occuper de moi et de mes projets.

La plupart de mes proches ont immédiatement compris. Ils se sont réjouis que je prenne ma nouvelle vie en main, et ils s’y sont adaptés. Pour ceux qui ont eu des difficultés à l’admettre, je me suis dit que ce n’était pas grave. Je tenterai de renouer des contacts plus tard.
Pour l’heure, j’ai réorganisé ma vie en fonction de mes priorités. Et le temps que je consacre à mon entourage est peut-être moins important qu’il n’a été dans les plus durs moments, mais je m’aperçois qu’il est de meilleure qualité, tout simplement parce que nous avons autre chose à nous dire que de commenter mon dernier bulletin de santé.

Encore que … Je n’ai pas été longue à culpabiliser de nouveau ! Alors que j’avais mis mes interlocuteurs dans un cadre non stressant pour moi-même, je ne me sentais pas en paix en restant plus de 48 heures sans donner de nouvelles (pas simple la vie !). J’ai donc appris à faire un texte très court et standard pour l’envoyer à mes enfants et amis : «pas de soucis, ça baigne, à bientôt ». Ainsi, tout est dit !

Je ne connais pas l’issue de cette grande aventure. Mais ce dont je suis certaine, c’est que je ne veux pas me laisser enfermer dans une sombre salle d’attente. Je veux profiter du temps regagné pour vivre chaque jour pleinement.

Note de l’Association “Mission Guérison” :
Un grand merci à Renate pour son témoignage ! Nous lui souhaitons très sincèrement le meilleur pour les mois qui viennent.

Pour aller plus loin après la découverte de ce témoignage, et découvrir la 7è des 7 notions à intégrer “Nous ne sommes pas seuls”, lorsque l’on est atteint d’une grave maladie : “Cliquez ici”